Les grands écrivains sont des torrents de désir et de volonté. Même quand leur vie est difficile, même après une dépression ou une période sans succès ni inspiration, ils retrouvent en eux la force de créer.
L’un de ceux dont la puissance créatrice nous touche est Wolfgang Goethe. Il suffit d’entrouvrir un de ses livres pour en mesurer l’énergie. Et quand il n’écrit pas, il cherche le secret des couleurs et la recette de la pierre philosophale qui lui permettrait de créer de l’or. Alors quand il raconte la manière dont il défend son inspiration, autant l’écouter. Il ne faut pas, disait-il, se contenter de travailler, il faut aussi croire ou décider de croire en sa capacité à réussir.
Commencez par le plus facile
Le premier succès est contagieux et il en produit d’autres, surtout au début d’une activité. Goethe conseillait ainsi aux jeunes poètes de commencer par de courts poèmes plutôt que des épopées. Les réussites du début renforcent l’envie de continuer. Il faut dans le même ordre d’idée manger le raisin en commençant par les meilleurs grains. Si vous voulez écrire l’histoire d’un pays, c’est une entreprise surhumaine. Commencez par une des périodes de l’histoire que vous connaissez le mieux. Puis passez à un temps plus difficile. Vous serez un jour tout surpris de vous trouver au bout de vos peines et vous regarderez avec étonnement la haute muraille de travail que vous venez de franchir. Ainsi le faucheur ne regarde pas le bout du champ mais l’herbe qui est devant lui et celui qui veut entreprendre un grand nettoyage attaque ses armoires par les coins les plus accessibles.
Chassez les chronophages !
La méthode de Goethe reste d’actualité quand il dit qu’il faut faire perdre aux gens le goût de tomber sur vous sans s’être annoncés. Ce qui fatigue, c’est moins l’activité que l’interruption permanente. C’est un devoir d’écarter les mangeurs de temps et les chronophages. Ils viennent par visite, téléphone, lettre, email ou SMS. Avec eux la bonté, la patience sont des fautes graves. Le devoir est de les traiter durement.
Les visiteurs indélicats demandent que l’on prenne intérêt à leurs affaires. « Ces visites ne servent qu’à me donner de pensées étrangères aux miennes et de celles-là, je n’ai pas besoin. J’ai assez des miennes que je n’arrive pas à mener à terme. Ah, jeunes gens ! Vous ne savez pas le prix du temps ». Imaginerait-on une entreprise organisée aujourd’hui selon les principes de Goethe tenant les chronophages en respect. Nous rêverions de recevoir nos mails et nos appels téléphoniques seulement au moment où nous les attendons. Mais qui peut s’offrir le luxe de la non-interruption ? Qui oserait encore dire qu’il ne répond pas quand on le sonne ?
Un grand pas vers la sagesse pourrait être de faire la différence entre les bonnes et les mauvaises distractions. Il est des interruptions qui ressourcent, donnent à notre fabrique d’envies une énergie nouvelle. Il en est qui ne font qu’interrompre une activité sans détendre ni faire plaisir. Elles déconcentrent, fatiguent et rendent le retour au travail plus difficile. Les technologies récentes augmentent encore le risque de distraction. Comme le travail se dématérialise et que l’on investit moins son bureau, il est plus difficile de rester concentré. Entre le temps passé à surfer sur Internet, répondre à ses SMS ou écrire des mails, un quart de la journée a vite fait de s’évaporer en interruption. Comme Goethe en son temps, et bien d’autres créateurs, sachez éconduire les opportuns, vous garder des fausses urgences et vous ménager des rendez-vous avec vous-même pour préserver votre énergie créatrice.
Application pratique : trichez avec votre « to do list »
Mettez deux tâches impossibles au début de la liste : classer toutes ses archives, apprendre régulièrement une langue étrangère… Vous n’en réussirez que mieux la troisième de la liste pour ne pas subir les deux premières.
Pour en savoir plus : « Réveillez vos désirs », publié aux éditions Plon, en février 2014
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