Par l’amélioration du management, j’entends ici l’amélioration des capacités de l’entreprise à prendre rapidement, les bonnes décisions à tous les niveaux. Je parle d’investir dans l’amélioration du système de management pour permettre aux collaborateurs de mieux travailler ensemble. Il s’agit de les accompagner, de les faire grandir, pour qu’ils soient en capacité de porter et développer l’entreprise. Je ne parle pas de système de management ISO.
Le management Lean a montré que c’est très rentable :
Très généralement, les meilleures marges de progrès ne sont pas dans les relations de l’entreprise avec l’extérieur (mieux acheter, mieux vendre, mieux recruter, mieux investir dans le matériel, trouver un marché de niche, une innovation de rupture, etc.). Les meilleures marges de progrès sont internes : il est possible de faire bien mieux que ce que l’on croit avec ce qui existe déjà.
Les témoignages de dirigeants sont très nombreux. Je donne cet exemple qui m’est passé sous les yeux le jour où j’ai écrit cet article car il est typique. Jacques Chaise, PDG de Danfoss nous dit dans un article que je traduis en français : « Le comité de direction d’une entreprise que nous venions juste de racheter nous a fourni une liste d’investissements stratégiques (machines, recrutements, etc.) Il leur semblait que c’était la meilleure voie pour se développer. Au lieu de cela nous avons uniquement investi une petite somme dans un système de management Lean. En 4 ans nous avons doublé les ventes »
Le Lean n’est pas le seul système de management performant. D’ailleurs s’il n’est pas sincèrement centré sur un développement humaniste des collaborateurs il est contreproductif à moyens termes, c’est souvent ce qui s’est passé en France et cela a malheureusement et à juste titre, terni son image.
Des études montrent que c’est très rentable :
Nous n’avons pas trouvé d’étude d’envergure indépendante concernant le retour sur investissement suite à l’amélioration du management. Probablement parce qu’il y a trop de systèmes de management différents (par la qualité, par les processus, Lean, libéré, holacratique, humaniste, inversé, etc.), probablement aussi parce que cela dépend plus du contexte et de la manière d’appliquer le système de management que du système de management en lui-même.
Si vous avez connaissance d’autres études, qui comparent les systèmes de management, nous vous invitons à partager l’information en commentaires de cet article.
Il y a des études de retour sur investissement concernant la modification de certains des éléments du système managérial. Ainsi l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail (EU-OSHA) a produit une étude en 2009, dont les résultats ont été corroborés en 2010 par l’Association internationale de la sécurité sociale (AISS) : les investissements dans la sécurité et la santé ont un ratio de rendement moyen de 2,2. C’est-à-dire un retour sur investissement de 220%. Or le bien-être n’est que l’un des effets corollaires (mais certain) de l’amélioration du système de management.
En 2013, une étude Alorem (partisane et donc à prendre avec recul) nous dit que pour un investissement sur le bien-être au travail qui passe par des modifications du système de management, le retour sur investissement moyen serait de 650%…
Une étude de grande envergure, réalisée par Ipsos pour Steelcase en 2016 corrobore les études annuelles de Gallup en chiffrant que les Français au travail seraient seulement 5% à être « fortement engagés et très satisfaits » et que 54% sont « désengagés ». Sachant ces chiffres et si l’on considère que les systèmes de management ont pour mission de bien faire travailler ensemble les collaborateurs, peut-on affirmer que les systèmes de management généralement en place sont performants ?
S’il est difficile de chiffrer précisément l’effet des collaborateurs engagés et désengagés sur les performances de l’entreprise, peut-on néanmoins se mettre d’accord sur le fait que c’est probablement plus impactant que n’importe quels autres facteurs économiques ?
Cela n’est pas valable dans un cas au moins. Tant qu’il est difficile de trouver du travail, et si l’on est sur des métiers où le turn-over ne pose pas de problème, il est possible d’avoir des collaborateurs très engagés et en souffrances, Amazon ou Lidl en sont des exemples, l’esclavagisme aussi. Outre le risque que cela représente pour l’entreprise, diriger c’est aussi faire des choix éthiques et politiques.
Mon expérience me prouve que c’est très rentable :
Avec mes associés nous accompagnons nos clients à mettre en place un système de management « agile et collaboratif ». Celui-ci inclut de nombreuses techniques associées à des postures : Lean et manager coach pour faire grandir les collaborateurs, sociocratie, intelligence collective, PNL, management situationnel et 3.0, codéveloppement, méthodes agiles, etc. L’évaluation moyenne de nos clients est de 9,2/10 pour l’année 2016 : modifier tout ou partie de leur système de management a été très profitable.
Voici la description précise d’un moment où, grâce au CJD, un dirigeant a pris conscience de la nécessité d’investir dans l’amélioration de son système de management. Son entreprise était en croissance, ses collaborateurs et ses clients très satisfaits, il pensait donc que son système de management était tout à fait suffisant. J’ai demandé à un collaborateur s’il avait récemment repéré « un écart avec ce qui était prévu ». Il m’a répondu : « j’ai passé 15 min de plus pour fabriquer cette porte à cause d’une fraise usée, trop vielle pour être affûtée. » Je l’ai aidé à chiffrer le temps perdu pour l’ensemble de l’entreprise à cause de ce problème. En cinq minutes nous sommes arrivés au constat que depuis six mois, 72 jours de travail avaient été gaspillés. Et nous avons fait un petit calcul : 72 jours multipliés par 110 € (salaire mensuel moyen chargé divisé par 18 jours ouvrés mensuellement) multiplié par 3 (ratio moyen dans toute entreprise pour tenir compte des charges et des frais liés au poste) = 23 760€. Auxquels il faut ajouter : une image client impactée négativement car la qualité esthétique de la porte et les délais de livraison avaient été dégradés, un impact des délais sur la trésorerie et un impact des délais internes sur l’ambiance de travail.
Le problème initial était connu, mais d’une part le système de management ne donnait pas les moyens nécessaires à la prise de conscience de l’ampleur du gaspillage (rôle et compétences pour s’arrêter, analyser les choses et les chiffrer) et d’autre part il ne permettait pas à la 1ère personne qui a observé le problème, d’agir pour le régler (responsabilisation, autonomie, circuit de décision et de suivi). La demande avait été faite et le dirigeant avait jugé utile de reporter de 6 mois l’investissement de 10 000€ dans un lot de fraises … pour mieux acheter et pour avoir un meilleur bilan.
A partir d’un problème qui semblait banal, parce qu’avec un peu de méthode on l’avait décortiqué à fond, le dirigeant avait découvert l’intérêt de faire évoluer son système de management. Une fois cette expérience faite et renouvelée sur d’autres problèmes qui semblaient également banaux, il a souhaité investir pour permettre à ses collaborateurs de continuer à décortiquer seuls de tels « problèmes qui sont des mines d’or ». Et qu’ensuite ils soient en mesure de mettre en place en autonomie, les réponses adaptés.
Pourtant les entreprises ne font généralement pas le choix d’investir dans l’amélioration de leur système de management : Pourquoi ?
Avant de lire la suite : quelle est votre propre réponse à cette question ? Pourriez-vous y répondre ci-dessous ? Ou écrire à contact@service-sens.com.
Voilà pourquoi je dis que « les entreprises ne font généralement pas le choix d’investir dans l’amélioration de leur système de management » : outre les résultats de l’étude susmentionnée, il suffit de regarder et demander autour de nous : on observe partout des critiques qui n’aboutissent pas à des améliorations. Or dans un bon système de management, ce genre de discours est peu présent. En effet, la plupart des collaborateurs ont confiance dans leurs capacités à faire changer les choses, puisque le système de management rend possible cette confiance.
En guise de réponse je vais plutôt poser des hypothèses …
- Les dirigeants ne savent pas que c’est le choix le plus rentable parce qu’il n’y a pas d’étude fiable sur le sujet, ou car ils n’ont pas le temps de se renseigner pour connaitre les faits décrits ci-dessus ?
- Ils en ont conscience, mais le fait de dépenser dans du « non tangible » fait peur : si j’achète une machine je la vois, mais là : comment être sûr qu’il y aura un retour ? « Je » ne maitrise pas, donc « je » préfère aller là où « je » maitrise, même si moins judicieux ?
- Pour maîtriser un investissement non tangible, il faut avoir confiance dans un consultant mais où les trouver et comment construire cette confiance ? Surtout quand on a déjà eu une mauvaise expérience. Les dirigeants ont difficilement le temps (ou n’ont pas le reflexe ?) de se renseigner auprès des clients affichés par les consultants.
- La vague « entreprise libérée » et « holacratie » qui prônent « le grand saut pour sortir du commander et contrôler» a fait fuir un grand nombre de dirigeants, qui vu les enjeux trouvent, bien légitimement, que c’est trop risqué. Et une partie de ceux-là pensent que tous les nouveaux systèmes de management demandent un « grand saut » ? (Alors que la sortie du « commander et contrôler » peut-être… très contrôlée, progressive, assurée).
- Ils associent systèmes de management et systèmes ISO qui ont parfois mauvaise presse : Quels effets humains ? Quelle rentabilité globale à moyen terme ?
- Il faut une rare humilité pour se dire que l’on a besoin d’une aide extérieure pour améliorer le système de management dont on est le principal responsable en tant que dirigeant ?
- Il est extrêmement difficile quand on est aux manettes d’une machine en ébullition, de réaliser que pour aller plus vite, il faut savoir s’arrêter. Partout, l’urgent ne prend-il pas le pas sur l’important ?
Tant que les dirigeants n’auront pas constaté d’énormes marges de progrès derrière des problèmes qu’ils n’avaient pas vus ou qu’ils avaient sous-estimés, ils n’investiront pas dans leur système de management. Et pour cela il faudrait déjà se faire accompagner. Alors un test gratuit, voire obligatoire, pour amorcer les choses est-il une bonne réponse ? Pour aller dans ce sens, après des années de transmission auprès de nombreux clients, il ne nous est jamais arrivé qu’après un test d’une demi-journée, qu’un dirigeant et toute son équipe ne souhaitent pas poursuivre…
Pour répondre collectivement à la problématique que pose cet article, nous vous proposons de diffuser et d’utiliser les fonctions « commentaires » du blog ci-dessous pour partager vos expériences.
Au plaisir de vous lire et de poursuivre les échanges sur ce sujet essentiel.
Louis-Marie Blanchard
Bien en phase avec ce que je viens de lire ! Au delà des résistances constatées, faut-il considérer qu’il y a aussi un changement culturel à opérer…! Au plaisir d’échanger ! Thierry
Le responsable pense être le mieux placé pour voir et proposer les changements. Cela aboutit a un échec rapide, les collaborateurs ne le suivent pas, ne le comprennent pas, ne sont pas impliqués dans ces décisions. Un acteur extérieur peut amener le responsable et les collaborateurs au même concensus et federer.