La reconnaissance au travail, intimement liée au bonheur des salariés
Les fondements du concept de la ” Qualité de Vie au Travail” ont été posés, dans les années 70, par Louis E. Davis et d’Albert Cherns, et revêtent quatre aspects : l’intégrité physique, l’intégrité psychique, le dialogue social et l’équilibre entre vie professionnelle et personnelle.
Plus récemment, en juin 2013, l’Accord National Interprofessionnel (ANI), cherchant à proposer une nouvelle approche de l’organisation du travail et de nouvelles solutions à la problématique de la qualité de vie au travail, a redéfini ce concept comme étant :
” Un sentiment de bien-être au travail perçu collectivement et individuellement, qui englobe l’ambiance, la culture de l’entreprise, l’intérêt du travail, les conditions de travail, le sentiment d’implication, le degré d’autonomie et de responsabilisation, l’égalité, un droit à l’erreur accordé à chacun, une reconnaissance et une valorisation du travail effectué “.
Bien loin d’une définition simpliste, il s’agit donc d’un ensemble de composantes essentielles à traiter différemment, chacun des facteurs interagissant avec les autres.
En avril 2015, le cabinet Deloitte publiait une étude menée auprès de 1791 salariés en France (tout secteur d’activités confondus), et mettait en lumière les principaux leviers d’influence et facteurs de bonheur au travail. On y retrouve sans surprise la reconnaissance et la solidarité en tête de la liste mais dont le manque et l’absence participent, selon les collaborateurs, à la dégradation du climat social au sein de l’entreprise tout en étant à l’origine du stress professionnel (pour 32% des cas).
À l’inverse, plus les employés se sentent reconnus, plus le niveau de responsabilité et de motivation augmente. Maintes entreprises l’ont compris et ont donc décidé de consacrer certaines de leurs pratiques managériales, et innovations RH, à ce sujet. Et les exemples ne manquent pas !
Reconnaissance au travail : l’exemple d’Axa Banque
Faire de l’innovation managériale pour la reconnaissance ? C’est le cas chez Axa Banque, où le management collaboratif est né au sein de l’entreprise en 2015, à partir du moment où les collaborateurs ont suggéré l’idée d’avoir un système informatique qui puisse leur permettre de se reconnaître entre eux.
Cette initiative bouleverse les codes de la ligne managériale puisque, traditionnellement, la reconnaissance était un dispositif dont s’occupe généralement le manager. C’est d’ailleurs au travers des entretiens annuels, des réunions de rétrospectives ou lors des promotions, que la qualité et la quantité du travail des collaborateurs est évaluée.
Le projet #ITAGYOU a alors été lancé en 2016 pour créer un outil qui permet la reconnaissance au quotidien entre pairs, et donc le renforcement de la culture de bienveillance, d’ouverture et de partage.
Comment ça marche ? Chaque employé bénéficie chaque mois de 3 tags qu’il peut choisir d’attribuer à un autre employé, pour lui montrer sa reconnaissance, indépendamment du lien hiérarchique qui existe et de la position/statut qu’ils occupent tous. Ces tags, symbole de feedback (exclusivement positifs) sont souvent accompagnés de commentaires, portant non seulement sur le travail réalisé, mais aussi sur les attitudes et comportements. Ils englobent quatre catégories : le leadership, l’innovation, l’efficacité, et le kiff. Les collaborateurs perçoivent ainsi leur engagement à travers le regard des autres, démarche innovante qui, jusque-là, n’existait pas.
Pour concrétiser cette reconnaissance, les tags sont par la suite transformés en chèques cadeaux dématérialisés et dont la valeur totale avait été de 15 000 euros les six premiers mois puisque 85% des collaborateurs s’étaient connectés sur le site et 99% avaient été tagués au moins une fois.
En 2016, Axa Banque a alors été désignée pour le prix de l’entreprise collaborative dans la catégorie e-RH et Management, suivi d’un Argus d’Or pour son innovation managériale en 2017.
Reconnaissance au travail : comment récompenser les collaborateurs ?
C’est la question que s’est posée Google, hésitant entre offrir à ses meilleures équipes, pour les féliciter de la qualité de leur travail, une prime financière ou des expériences immatérielles.
Pour prendre sa décision, le géant du net a préféré questionner directement les collaborateurs au sujet de leurs préférences, sondage à travers lequel l’aspect financier l’emporte avec 31% des voix. Le département des ressources humaines saisit alors cette occasion pour mesurer l’impact de ces récompenses sur la motivation et la satisfaction des salariés, et a donc agi selon les goûts des collaborateurs : ceux qui appréciaient mieux les primes en ont reçu, tandis que les autres ont bénéficié de voyages, fêtes ou cadeaux de la même valeur.
Six mois après, l’entreprise a diagnostiqué que le niveau de satisfaction des collaborateurs ayant reçu de l’argent avait chuté de 25% alors que celui des autres était resté le même puisque les expériences qu’ils ont pu faire étaient restées “plus mémorables”.
Comme Axa Banque, Google a décidé de mettre en place un dispositif qui permet une meilleure reconnaissance entre pairs, et des liens sociaux internes plus nombreux. Ainsi, c’est 175 dollars par mois qui ont été remis à tous les collaborateurs, somme qu’ils doivent tous se redistribuer entre eux, en guise de remerciement.
Reconnaissance au travail : raisons et pratiques multiples
La reconnaissance est porteuse de nombreux avantages, elle permet, entre autres, de :
- Se faire connaître, tout d’abord, au sein de l’entreprise, par la hiérarchie et par les collègues de travail
- Tisser des liens à caractère plus chaleureux, renforcer donc la bonne humeur, et développer l’écoute et la solidarité
- Donner une part de responsabilité à chacun, pour plus impliquer et encourager les initiatives personnelles
- Instaurer un système de feed-back plus récurrent et sous une autre forme que les entretiens classiques
- Mieux diagnostiquer et repérer les évolutions individuelles, maximiser les possibilités et le taux de mobilité interne
- Améliorer sa marque employeur à travers ce facteur d’attractivité
Frederick Herzberg, psychologue et professeur de management à l’Université de l’Utah dans l’ouest des Etats-Unis, a concentré bon nombre de ses travaux sur la motivation des individus au travail.
Nous résumons sa théorie en lui empruntant la phrase suivante : ” Les facteurs d’insatisfaction sont relatifs aux conditions de travail. Les facteurs de satisfaction sont relatifs à l’épanouissement de l’individu dans son travail “.
Cela revient à dire que les ” bonnes ” conditions de travail (organisation et structure de l’entreprise, salaires, statuts et positions, sécurité, etc) sont nécessaires, mais ne suffisent pas à provoquer et maintenir la motivation des collaborateurs. À ceux-là devraient s’ajouter d’autres facteurs comme la possibilité de trouver sens dans son activité, se réaliser, évoluer dans sa carrière, gagner en autonomie… Si la reconnaissance n’est pas prise en compte, ces éléments contributeurs à l’épanouissement ne peuvent opérer.
Évidemment, il n’existe pas une meilleure façon de faire. Bruno Wierzbicki, DRH d’ACMN-Vie – société d’assurance-vie du groupe Crédit Mutuel – témoigne de sa pratique à lui, qui consiste à rencontrer tous les collaborateurs, un par un, en dehors du cadre d’entretiens évaluatifs :
” J’explique simplement que je veux rencontrer la personne pour lui dire en face qu’elle est importante pour nous, et le faire de vive voix. Que l’entretien peut s’arrêter là, mais que je suis prêt à écouter et échanger, en posant un cadre, celui de l’absence de jugement, et en rappelant que tout ce qui sera dit restera entre mon interlocuteur et moi “.
Chez GRDF – Gaz Réseau Distribution France -, en 2016, un espace intranet qui exclusivement dédié à la reconnaissance, a été créé. La même année, chez LPO-Agir – Ligue pour la protection des oiseaux – l’initiative ” Vis ma vie “ a vu le jour, permettant aux collaborateurs de passer des journées les uns auprès des autres, pour expérimenter d’autres missions et statuts que les leurs au sein de l’entreprise, et donc valoriser aussi bien ” l’accueillant ” que le ” découvreur “.
Source : changethework.com
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